
C’est à Jeurre, dans le Jura, que Michel et Noëlle Muyard exercent la tournerie et la tabletterie sur corne. En 1920, le grand-père de Michel débute dans le métier. Il sera rejoint par son fils et sa femme qui ensuite emploieront 2 ouvriers. Pendant ce tempslà, Michel fait ses études dans la mécanique. Au départ des 2 ouvriers, Michel entre dans l’entreprise familiale et lorsqu’il se marie, ses parents embauchent également son épouse Noëlle. Voilà 52 ans maintenant qu’il exerce le métier. Cette année, l’

Le métier est en voie de disparition, hélas ! Autrefois à Saint-Claude et ses alentours, il y avait une cinquantaine d’ateliers qui travaillaient la corne. À Oyonnax, il y a 100 ans et jusqu’à l’arrivée de la cellulose, toute la ville travaillait la corne. La matière plastique est la suite logique puisque la corne peut se modeler à chaud, s’aplatir et être retravaillée dans des moules afin de fabriquer des couverts à salade, des chausse-pieds et toutes sortes d’articles. Actuellement, il ne reste plus que 2 ateliers dans la vallée. Michel et Noëlle ont leur boutique, adjacente à l’atelier, où ils vendent leurs articles. Chacun a ses tâches, Michel s’occupe de la mise en forme des objets et de la visite guidée de l’atelier, Noëlle s’occupe de la finition, du montage des bijoux, de la boutique et de l’administratif. C’est vraiment un métier et un savoir-faire propre à la région. La plupart des tourneurs étaient agriculteurs, les hivers étaient froids et rudes alors pour s’en sortir financièrement, il fallait une autre activité et puis la pipe était en plein boom et la plupart des tourneurs fabriquaient des tuyaux de pipe. Ce sont les moines de Saint-Claude qui leur ont appris la tournerie. L’un d’eux avait même offert au pape, à Avignon, une chaise entièrement tournée.

Michel, d’où provient la corne et quelle variété utilisez-vous ?
On utilise les cornes de différents animaux, du bœuf principalement, du bélier, de la chèvre ou bouc et également du bois de cerf et un peu de buffle. Nous achetons des lots dans les abattoirs, autrefois il existait un grossiste à Saint-Claude, la Maison Guichard qui avait en permanence 100 tonnes de stock. Quand ils ont arrêté, nous avons partagé le stock avec les autres tourneurs, et moi j’en avais 10 tonnes pour le roulement. Avant de l’utiliser, il faut 3 ans de séchage. Maintenant, je n’en utilise plus que 2,5 tonnes par an.

Les articles sont vendus dans les boutiques souvenirs un peu partout en France et chez eux à Jeurre. Autrefois, le grand-père fabriquait plutôt des objets utilitaires, des salières, des poivrières, des couverts à salade, des chausse-pieds, des poignées de portes pour les magasins, les tuyaux de pipe, etc… Le plastique étant arrivé, pour un coût bien moindre que la corne, il a dû s’orienter vers l’article souvenir comme tous les autres artisans. Ensuite, ses parents se sont tournés vers les bateaux, les poissons, les cornes d’appel, puis ils ont suivi la tendance avec les bijoux fantaisies et ceux que l’on vendait uniquement sur commande pour les maisons de mode.

Dans les années 1975, le Comité Départemental de Tourisme a demandé à tous les artisans de faire de la démonstration dans leurs ateliers pour les touristes et de créer des boutiques. S’ils ne l’avaient pas fait, leurs métiers n’existeraient déjà plus.

Utilisez-vous toute la corne pour faire les objets ?
Oui, en tournerie on scie la pointe, qui est pleine, avec celle-ci on fait des boutons, des tuyaux de pipe, des manches de couteaux ou des perles pour faire des colliers. Avec la partie creuse, il y a deux possibilités, soit on l’utilise en rondin soit on l’aplatit. En rondin, elle servira à fabriquer des pots à crayons avec le plus gros des diamètres, des bracelets, des ronds de serviettes, des salières et poivrières et des coquetiers juste à la limite de la pointe. Cela permet d’utiliser toutes les parties de la corne. Pour l’aplatir, on va la chauffer à 120-140°, on la sépare en deux, on la met sous presse et on obtient une plaque de corne. À partir de là, on va faire des broches, des pendentifs, les queues pour poissons, les ailes d’oiseaux, les couverts à salade et toutes sortes d’articles à plat. On peut aussi utiliser la corne entière pour tout ce qui est vases, cornes à boire, pour les corps de poissons, etc…

Pour fabriquer tout cela, il faut tout un tas d’outils comme des scies à ruban ou circulaires, des meules pour ébaucher la forme, de la toile émeri pour les demi-finitions et enfin des rouleaux de toiles différentes pour poncer et faire briller. Au fur et à mesure du ponçage, on voit apparaître les veines et les couleurs de la corne qui correspondent au pelage de la bête. Pour la gravure, Michel utilise des petites fraises sur un tour à canneler et des moules en acier et en bronze pour donner forme aux couverts.

Michel Muyard, à la retraite mais toujours actif, prend du temps pour fabriquer des objets qui lui font plaisir et laisser libre cours à son imagination. Il fabrique des instruments de musique miniatures, le résultat est impressionnant et vaut le détour.

Michel et Noëlle vous accueillent à la boutique et pour une visite de l’atelier avec démonstration de fabrication d’objets originaux tous les jours de 8h à 12h et de 14h à 19h en pleine saison et aux mêmes horaires hors saison sauf le dimanche après-midi.
Michel Muyard
Artisan sur corne
5, rue de la Gare
39360 JEURRE
03 84 42 41 93